Depuis 2017, en Espagne, Federica Bertocchini travaille sur la larve de la fausse teigne dont deux enzymes de la salive peuvent dégrader rapidement le polyéthylène, l’une des matières plastique les plus utilisées. Elle vient de mettre au jour le mécanisme de cette dégradation qui pourrait conduire à la mise en place d’une solution bio-technologique à l’échelle industrielle pour éliminer l’excès de plastique dans le monde.
Des enzymesenzymes présents dans la salivesalive de larves peuvent dégrader rapidement l’une des matières plastiqueplastique les plus utilisées dans le monde, ouvrant une piste de lutte contre cette forme de pollution, selon une étude publiée le 4 octobre 2022 dans Nature Communications. Sur les 400 millions de tonnes de matièresmatières plastique produites chaque année selon les estimations de l’OCDEOCDE, un tiers environ sont des polyéthylènes. Issus de la pétrochimie, simples et peu chers à fabriquer ils sont notamment très utilisés pour les emballages.
Le saviez-vous ?
Très résistant, le polyéthylène représente 40 % de la demande des produits en matière plastique en Europe. Il lui faut jusqu’à un siècle pour se dégrader dans la nature.
L’ONU, qui qualifie la pollution au plastique de fléau mondial, a récemment lancé des négociations pour l’élaboration d’un traité international destiné à réduire ce phénomène. Le fait que certaines enzymes puissent attaquer les matières plastique était déjà documenté, mais sur de longues duréesdurées (lire notre article ci-dessous).
Or, selon les travaux d’une équipe de chercheurs espagnols, deux enzymes présents dans la salive des larves du papillon de nuitpapillon de nuit « Fausse teigneteigne de la cire » (Galleria mellonella) attaquent le polyéthylène en quelques heures seulement à température ambiante. Federica Bertocchini, du centre d’études biologiques Margarita Salas de Madrid, auteure principale de l’étude et apicultrice amateur, a expliqué avoir eu l’idée de cette recherche en nettoyant des ruches stockées pour l’hiverhiver et dont les rayons de cire avait été colonisés par ces larves. Ayant nettoyé les ruches, elle a mis les larves dans un sac en plastique et constaté peu après que celui-ci était « plein de trous ».
« La question était, est-ce qu’elles (les larves) le mangent ou y a-t-il un processus chimique ? Nous avons vérifié en laboratoire et découvert que le polyéthylènepolyéthylène avait été oxydé », a-t-elle expliqué à l’AFP. De nombreux travaux et expérimentations complémentaires seront nécessaires pour comprendre parfaitement le processus avant d’envisager une applicationapplication concrète de la découverte, soulignent les chercheurs.
Mais Federica Bertocchini imagine déjà différentes pistes d’utilisation contre la pollution du plastique. « Les enzymes pourraient être intégrés à une solution liquideliquide et versées sur du plastique en déchetterie », ou bien être utilisés dans des lieux isolés où la collecte ou le recyclage sont difficiles, voire à terme dans des foyers individuels pour dégrader leur propres déchetsdéchets.
Article de Xavier DemeersmanXavier Demeersman, publié le 27 avril 2017
Une scientifique, qui est aussi apicultrice, a découvert que la larve d’un parasite qui s’attaque à la cire des ruches, est friande des matières plastiques. C’est plutôt une bonne nouvelle pour la lutte contre les déchets en plastique qui pullulent, avec une croissance exponentielle, dans les sols et les océans.
Voici quelques jours, nous apprenions par le CNRS et une étude publiée dans Science Advances que l’océan ArctiqueArctique est lui aussi touché par les déchets de plastique. Il y en aurait plusieurs centaines de tonnes, voire plus, éparpillés en 300 milliards de petits fragments, pour la plupart de la taille d’un grain de riz. « Nous assistons peut-être à la formation d’une autre poubelle de la planète, sans comprendre totalement les risques encourus pour la faunefaune et la flore locales » interpellait Maria-Luiza Pedrotti du CNRS.
Dans le monde, chaque année, selon une étude de 2015, ce sont 8 millions de tonnes de polymèrespolymères qui arrivent dans les océans. Ces déchets réduits en petits morceaux pullulent et nuisent considérablement aux écosystèmes marins. Ainsi, ce serait quelque 110 millions de tonnes qui s’accumuleraient à présent dans ce milieu.
Parmi les plus répandus, le polyéthylène (80 millions de tonnes produites dans le monde chaque année), très utilisé pour les emballages, est le plus résistant. Représentant 40 % de la demande des produits en matière plastique en Europe, il lui faut pas moins d’un siècle pour se dégrader dans la nature (400 ans pour les plus durs). Cependant, des produits très corrosifs comme l’acideacide nitrique en viennent à bout en quelques mois. Mais il y aurait encore mieux : Galleria mellonella, plus connue sous le nom de larve de la fausse teigne de la cire. Elle a de bonnes chances de devenir l’ennemi numéro un du polyéthylène.
Une larve d’un parasite à l’appétit vorace
La larve de ce papillon est plutôt très répandue. Elle est souvent employée comme appâtappât dans la pêchepêche et on la rencontre dans les ruches où elle se délecte de la cire. Federica Bertocchini, du Centre espagnol de la recherche nationale (CSIC) et apicultrice amateure, avait remarqué à plusieurs reprises que les sacs en plastique dans lesquels elle mettait la cire ravagée par ce parasite se retrouvaient rapidement criblés de trous. La scientifique a alors tenté l’expérience en laboratoire avec différentes matières plastiques et, à chaque fois, les larves les réduisaient en peau de chagrin en un temps record.
Par exemple, sur un plastique venant d’un supermarché britannique, elle a pu constater avec son équipe qu’une centaine de larves l’avaient dégradé significativement en moins d’une heure. En 12 heures, il avait perdu 92 mg. C’est une énorme performance : en 2016, une bactériebactérie réussissait au mieux à réduire certains plastiques de 0,13 mg… en 24 heures.
Dans leur article publié le 24 avril dans la revue Current Biology, les chercheurs estiment que la larve ne fait pas que les ingérer, elle les transforme déjà chimiquement dans leur salive. « L’une des prochaines étapes sera de tenter d’identifier [cette réaction] et de déterminer comment isoler la ou les enzymes responsables », écrivent-ils.
« S’il s’agit d’une simple enzyme, on pourra alors la fabriquer à une échelle industrielle grâce à la biotechnologiebiotechnologie », s’enthousiasme Paolo Bombelli (université de Cambridge), qui a cosigné ces recherches. Cette découverte représente effectivement un grand espoir pour faire disparaître en quantité ces déchets répandus sur Terre et dans les océans.