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Quel avenir pour les fusées européennes ? Entretien exclusif avec Josef Aschbacher, directeur général de l’ESA



À l’occasion d’un entretien exclusif, Josef Aschbacher, directeur général de l’Agence spatiale européenne (ESA), nous rappelle les objectifs du spatial européen, représentant aujourd’hui 230 000 emplois, et du rôle de l’Espace au service de notre société et de la Planète. Focus sur les lanceurs européens.

L’Agence spatiale européenne (ESA) vit l’une des dates les plus importantes de son calendrier : c’est au cours du Conseil ministériel, qui se tient les 22 et 23 novembre à Paris, et qui rassemble les ministres représentant les 22 États membres de l’Agence, que va se décider la politique spatiale européenne, ses programmes et bien sûr, son budget pour les trois prochaines années.

Par la voix de Josef Aschbacher, l’ESA a demandé un budget record de 18 milliards d’euros, soit 25 % de plus que la demande de 2020.

Futura : Parlons d’accès à l’espace avec Ariane 6. Où en sommes-nous actuellement ?

Josef Aschbacher : L’ESA se positionne en tant que client mais aussi comme architecte de l’ensemble. Nous renforçons notre attention sur le management des dernières étapes à franchir afin d’obtenir un vol inaugural d’Ariane 6 aussi vite que possible. Nous avons pour cela créé une équipe transversale, basée aux Mureaux (Yvelines), qui travaille quotidiennement sur les dernières étapes. Les débuts des essais à feu de l’étage supérieur à Lampoldhausen (Allemagne) et des essais combinés à Kourou sont des étapes importantes, qui déclencheront d’autres actions jusqu’au vol. D’ailleurs, c’est seulement à l’issue de ces tests que nous aurons une idée plus précise de la date de tir.

Quel est l’avenir de l’industrie européenne pour ses lanceurs après le passage de témoin d’Ariane 5 à Ariane 6 ?

Josef Aschbacher : Plus besoin de rappeler la précision d’Ariane 5, telle que nous l’avons vue avec le succès de la mise en orbite du télescope spatial James-Webb. Quand nous avons décidé en 2014 de passer à Ariane 6, le principal argument était de la rendre plus accessible et donc de réduire les coûts de 40 %. Pour cela, nous avons simplifié certains éléments ainsi que la ligne de production au sein d’ArianeGroup.

Nous avons aussi négocié avec les fournisseurs de sorte à être plus compétitifs. Le second argument est celui de la flexibilité, avec les versions 64 [ndlr : 4 boosters latéraux] et 62 [ndlr : 2 boosters]. Cette dernière version nous permettra de remplacer la fusée Soyouz. Enfin, comme dernier argument, nous avons le booster P120C, utilisé à la fois comme booster d’appoint pour Ariane 6 et comme étage principal de la fusée Vega-C.

En matière de souveraineté, il est aussi bien sûr question de rendre les lanceurs européens plus… européens

Josef Aschbacher : Il est clair qu’à la suite de l’interruption des tirs Soyouz à Kourou, nous ne pouvons plus compter sur ce lanceur. Nous devons renforcer notre résilience et notre autonomie et c’est exactement ce que nous faisons avec Ariane 6, Vega-C, et les autres micro-lanceurs privés qui arrivent. L’Europe doit s’assurer de disposer de lanceurs de toutes catégories pour envoyer nos satellites dans l’espace. Il est fondamental pour l’Europe de garantir un accès à l’espace.

Qu’en est-il aujourd’hui de l’idée d’une Europe disposant de son propre vaisseau spatial ?

Josef Aschbacher : Pour l’instant, il n’y a pas encore de prise de position concernant les États membres de l’agence. Lors du Space Summit à Toulouse, ces derniers nous ont mandatés pour établir un groupe afin d’étudier les directions que pourrait prendre l’Europe en matière d’exploration humaine et robotique. C’est autant une question technique que politique.

Il est dans l’ADN de l’ESA de s’adapter au changement

À ce titre, il m’a été demandé de regarder les différentes options. On peut soit continuer comme aujourd’hui, soit choisir d’être plus autonome en capacité d’exploration. Nous consultons beaucoup de monde et nous préparons les discussions pour un prochain Space Summit à la fin de l’année. Donc, aucune décision n’est prise pour le moment car nous devons d’abord savoir ce que l’Europe souhaite. Ensuite, nous pourrons proposer des solutions et définir les travaux à faire. C’est ce que nous faisons à l’ESA : nous préparons la technologie pour être prêts à répondre aux décisions quand elles seront prises. Il est dans l’ADN de l’ESA de s’adapter au changement.

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Written by Milo

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