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« La protection de la nature revient à sacrifier les communautés de l’intérieur au bénéfice de celles de l’extérieur »

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Spécialiste de l’histoire de l’environnement et de l’Afrique au XXsiècle, Guillaume Blanc dirige avec Mathieu Guérin, historien de l’Asie du Sud-Est, et Grégory Quenet, professeur en histoire de l’environnement, Protéger et détruire. Gouverner la nature sous les tropiques (XXe-XXIe siècle). Un ouvrage qui explore la manière dont se sont construites les politiques de la nature en Afrique et en Asie, de la colonisation à nos jours.

Selon vous, les indépendances ne représentent pas une rupture. Pourquoi ?

Il y a, au niveau des politiques de la nature, une continuité entre la période coloniale et la période postcoloniale. En 1961, la conférence d’Arusha (Tanzanie) réunissant experts occidentaux et délégués africains vise à poursuivre le travail accompli à l’époque coloniale. Et débouche sur la création du Fonds mondial pour la nature (WWF) pour « financer les experts qui iront aider les gouvernements africains à s’aider eux-mêmes ». Or ces experts sont d’anciens administrateurs coloniaux qui vont rester jusqu’à la fin des années 1970 à conseiller les pays africains et asiatiques.

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Pour autant, nous ne sommes pas dans une situation néo-impériale. Les dirigeants asiatiques ou africains ont très bien su instrumentaliser cette politique pour des raisons économiques et politiques qui leur sont propres. En Tanzanie, par exemple, le tourisme en milieu naturel va représenter jusqu’à 20 % du PIB annuel, et le déplacement des populations a participé à la collectivisation des campagnes sur le modèle soviétique. Pour l’Indonésie, cela a été un moyen de réguler les tensions entre Malais et Chinois en créant des zones où l’Etat pouvait s’implanter durablement.

Cela vous a amenés à repenser les chronologies.

Si on fait une histoire des Sud par les Sud alors la chronologie n’est pas celle européanocentrée « colonisation-décolonisation ». Mais la politique de la nature montre qu’elle s’articule autour de la construction de l’Etat, de la formation de l’Etat et de l’Etat néolibéral. De 1900 à 1930, période de construction de l’Etat colonial, des Européens militent auprès des administrations coloniales pour créer des réserves de chasse, en en expropriant les Asiatiques et les Africains dont les pratiques sont criminalisées. Des années 1930 aux années 1980, c’est l’ère de la préservation, avec des parcs nationaux, sortes de sanctuaires de la nature. Cela correspond à la formation de l’Etat colonial, qui contrôle par le bas le quotidien des populations, et cela se poursuit après 1960. Enfin, on entre dans une troisième période, celle de la conservation communautaire des aires de biodiversité. C’est l’aire néolibérale des Etats avec une financiarisation de la nature, notamment avec des aires protégées à des fins touristiques.

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Written by Stephanie

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