Dans ce long courrier adressé au président de la République, les professionnels de santé exigent que celui-ci soit “à (leurs) côtés”, mais aussi qu’il reconnaisse “la responsabilité de l’Etat dans la crise sanitaire majeure que nous vivons.”
“Votre silence est assourdissant.” Plus d’un mois après une première lettre ouverte transmise à Emmanuel Macron, dans laquelle les professionnels de santé tançaient l’inaction politique du gouvernement en ce qui concerne la saturation des services pédiatriques hospitaliers, en partie provoquée par les nombreux cas de bronchiolite, 10.000 soignants adressent ce mercredi un nouveau courrier bien plus acerbe au président de la République.
Situation tendue et culpabilité
Publié dans le quotidien Le Monde, le document émargé par plusieurs sommités dont le professeur Robert Cohen, président du Conseil national professionnel de pédiatrie ou encore le professeur Rémi Salomon, président de la Commission médicale d’établissement de l’AP-HP, débute par une description détaillée du quotidien des services pédiatriques.
Les signataires décrivent ainsi des “enfants hospitalisés sur des brancards ou sur les genoux de leurs parents aux urgences” ou “intubés et hospitalisés sans chambre dans le couloir de la réanimation” ainsi que “des prises en charge trop tardives et des soins précaires” et “des retours prématurés à domicile et des retours en catastrophe d’enfants renvoyés chez eux faute de place.”
Pire, les soignants font également état de leur culpabilité “d’envoyer des adolescents au sein de services adultes.” “Ce sont désormais des enfants âgés de 3 ans que nous envoyons”, pointent-ils encore.
Selon eux, les transferts de patients entre hôpitaux de différentes régions sont une dégradation grave des soins d’autant que “l’épidémie a déferlé partout, saturant l’ensemble des services de pédiatrie français.” Le 9 novembre, le ministre de la Santé François Braun avait déclenché le plan ORSAN au niveau national pour affronter cette épidémie de bronchiolite.
Des réponses rapides
Une fois le diagnostic posé, les soignants assurent refuser d’être “l’éternelle variable d’ajustement” de l’hôpital et reprochent à Emmanuel Macron de n’être “pas apparu pour rassurer les parents” ni “assurer les soignants de votre soutien.”
“A la place, votre gouvernement empile les enveloppes et les mesures d’urgence temporaires”, dénoncent-ils.
Début novembre, François Braun avait annoncé de nouvelles enveloppes “de l’ordre de 400 millions d’euros” pour faire face aux problèmes du secteur hospitalier, dont l’accueil avait été plutôt mitigé parmi les professionnels de santé, qui estiment que le problème n’est pas pécuniaire.
Dans ce courrier, les signataires listent encore leurs doléances. Ils exigent qu’Emmanuel Macron soit “à (leurs) côtés” et qu’il reconnaisse “la responsabilité de l’Etat dans la crise sanitaire majeure que nous vivons”. Selon eux, le chef de l’Etat doit s’engager “à prendre les mesures nécessaires pour sécuriser le travail des soignants à l’hôpital” dont celle de “la reconnaissance de la spécificité et de l’expertise de la pédiatrie.”
Il est également exigé un engagement pour “remettre le service hospitalier au centre des décisions” et “augmenter le nombre de jeunes formés aux métiers du soin et à assurer la formation générale en pédiatrie de chacun.”
Selon cette lettre ouverte, le temps presse et les professionnels de santé espèrent que ces propositions seront discutées “plus spécifiquement lors des Assises de la pédiatrie, au printemps 2023.” “Une société qui ne peut plus prendre soin des enfants est une société sur le déclin”, alertent encore les signataires, qui, en conclusion, interrogent: “Dos au mur, la France saura-t-elle sauver ses enfants?”
Les pédiatres s’attendent à un pic de l’épidémie de bronchiolite à la fin de cette semaine.