Vieux de près d’un siècle, le barrage de Sukkur s’étend majestueusement sur 1,6 kilomètre, entre les deux rives de l’Indus. Sous les rayons du soleil couchant, la pierre irradie le paysage d’une chaude lumière jaune. Les portes qui contrôlent le flot des eaux sont articulées entre d’élégantes arches. De cet édifice construit par les Britanniques en 1932 dépend le sort de centaines de milliers de personnes. Il est la pierre angulaire de l’un des plus grands systèmes d’irrigation au monde et doit permettre de prévenir les inondations. Ses canaux traversent les terres agricoles de la région du Sind, dans le sud du Pakistan, sur près de 10 000 kilomètres.
Mais la vétusté de la structure fait craindre qu’elle soit, à l’avenir, incapable de réguler les crues de l’Indus. A la fin du mois d’août, lorsque des pluies torrentielles se sont abattues sur le Pakistan, provoquant les pires inondations de l’histoire du pays, les ingénieurs du barrage de Sukkur n’en menaient pas large. Les rivières et les ruisseaux des montagnes alimentaient dangereusement le fleuve, qui ne cessait de grossir. « Par chance, au moment du pic, il n’a pas plu dans la région du Dera Ghazi Khan [dans le sud du Pendjab, en amont de Sukkur], sinon, nous aurions été face à une catastrophe », reconnaît Abdulaziz Soomro, l’ingénieur qui dirige la salle de contrôle du barrage. Cette dernière témoigne de l’état de vétusté de la structure qui faisait autrefois la fierté de la région. La pièce est rongée par le temps et les murs décrépis semblent s’effriter à vue d’œil sous l’effet de l’humidité.
« Le barrage est encore capable de gérer des flots élevés, mais pas les super inondations et il a besoin d’être réhabilité », concède Abdulaziz Soomro. La structure en pierre n’est équipée ni des matériaux ni des technologies adaptés. Ici, les relevés et le calcul des flots sont encore manuels, consignés dans un cahier, puis saisis dans un ordinateur. « Si ce barrage s’effondre, alors c’est toute l’économie de la région qui s’effondrera avec lui », prévient Sardar Ali Shah, l’ingénieur en chef du barrage. Des travaux de réhabilitation, soutenus par la Banque mondiale, et qui doivent être mis en œuvre par une entreprise chinoise, sont prévus de longue date et débuteront dès la décrue, assure le responsable. Mais, en 2010 déjà, le Pakistan avait été dévasté par des inondations au cours desquelles 2 000 personnes avaient péri. Et les critiques reprochent au gouvernement de ne pas avoir tiré les conclusions de ce désastre.
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