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Qu’est-ce que le Traité international sur la charte de l’énergie que la France vient de quitter ?



Le président Emmanuel Macron a annoncé vendredi sa décision de retirer la France du Traité international sur la charte de l’énergie. Ce Traité très controversé empêche la transition vers des énergies propres, alors que les énergies fossiles sont les principales responsables du réchauffement climatique.

Le Traité international sur la charte de l’énergie, ou TCE, permet aux entreprises des énergies fossiles (pétrole et gaz) de porter plainte contre les États qui menacent leurs intérêts financiers. En d’autres termes, ces entreprises peuvent attaquer en justice les pays qui mettent en place des stratégies de lutte en faveur de la transition énergétique vers des énergies moins polluantes : tout pays ayant signé le Traité, et qui tente de lutter contre le réchauffement climatique lié aux émissions de gaz à effet de serre, peut donc être conduit devant un tribunal privé !

À l’origine, la signature du TCE avait un objectif de sécurité d’approvisionnement : pour l’Europe, l’idée était d’assurer la disponibilité des énergies dans un contexte politique et économique instable, juste après la chute du mur de Berlin.

Des attaques en justice pour les pays voulant lutter contre le réchauffement climatique

Ce traité, jugé « climaticide » par de nombreuses associations environnementales, a été signé en 1994 et est entré en vigueur en 1998. Cinquante-deux pays l’ont ratifié, dont les États de l’Union européenne, la Russie, l’Australie, le Japon, l’Afghanistan, la Turquie ou encore le Monténégro. Depuis, plusieurs pays ont déjà décidé de le quitter, comme la Russie, l’Espagne, la Pologne, l’Italie, et plus récemment les Pays-Bas. Tiraillés entre les risques d’attaques en justice des entreprises d’énergies fossiles et la nécessité de prendre des actions en faveur de la transition énergétique, de plus en plus de pays ont quitté le TCE ces dernières années. D’autres États qui ne l’ont pas signé ont une position officielle d’observateurs, comme les États-Unis, le Canada, la Chine, le Qatar, les Émirats arabes unis, l’Égypte, le Pakistan, la Colombie, le Maroc, la Corée du Sud… Dans ce cas, les États ont le droit d’assister aux réunions et d’être tenus au courant de toutes les informations, afin de se familiariser avec le Traité en vue d’une éventuelle future adhésion.

Pour les pays signataires, l’effet est dissuasif car les attaques en justice et les sommes réclamées par les compagnies pétrolières et gazières sont faramineuses. Depuis 1998, au moins 150 plaintes ont été déposées par des entreprises. Après avoir annoncé sa volonté de renoncer au charbon d’ici 2030, les Pays-Bas ont par exemple été attaqués par la compagnie allemande RWE, qui réclamait une compensation de 1,4 milliard d’euros.

La France devra continuer à appliquer le Traité pendant 20 ans

Alors que le Giec a déjà mis en garde contre l’impact catastrophique du TCE, de nombreux pays ont demandé que le Traité fasse preuve de plus de flexibilité, mais malgré de nombreuses discussions, l’Union européenne n’a pu obtenir qu’une légère réforme. Pour la France, l’application du TCE est très problématique à l’heure actuelle, dans un contexte marqué par la crise énergétique et l’inflation des prix : en réglementant le coût de l’énergie pour éviter une trop forte hausse des prix, la France s’expose à une attaque en justice de la part des fournisseurs. 

L’objectif de neutralité carbone, qui passe par une limitation de l’utilisation des énergies fossiles, n’est pas clairement compatible avec les clauses du Traité. Le 19 octobre dernier, le Haut conseil pour le climat avait demandé à l’Union européenne de se retirer du Traité. Après la France, d’autres pays semblent avoir engagé des discussions pour quitter le TCE, dont l’Allemagne et la Pologne. Mais malgré sa décision de retrait, la France sera toujours contrainte d’appliquer les dispositions du Traité jusqu’en 2043 : aussi incroyable que cela puisse paraître, une « clause de survie » prévoit en effet une application obligatoire de celui-ci pendant 20 ans après un retrait, sauf si la nouvelle révision du Traité (qui doit s’opérer en novembre) modifie cette directive. Une aberration environnementale alors même que la hausse des températures dans notre pays vient d’être réévaluée : +1,7 °C en France par rapport aux niveaux pré-industriels.

 

 

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Written by Milo

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