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L’espoir de traiter la cataracte sans chirurgie se profile


The ConversationQuand j’ai commencé mon doctorat, j’avais la ferme intention de trouver un remède à la cataractecataracte – pas après quelques décennies de recherche, mais pendant la duréedurée de ma thèse. Voilà pour mon enthousiasme et ma naïveté de l’époque… Mais quelques décennies plus tard, finalement, ce rêve semble se rapprocher.

La cataracte résulte de l’accumulation dans le cristallin de protéinesprotéines fragmentées qui vont peu à peu l’opacifier. Cette agglutination de matièrematière altère la bonne transmission de la lumièrelumière jusqu’à la rétine, ce qui donne cet aspect brumeux caractéristique à l’œilœil. Mais, surtout, elle entraîne une diminution de la vision qui se fait plus floue. C’est la cause d’environ 43 % des cas de cécité.

L’intervention chirurgicale consistant à retirer le cristallin opacifié et à le remplacer par un équivalent artificiel est jusqu’à présent le seul traitement disponible. Environ 10 millions d’opérations de la cataracte sont réalisées chaque année dans le monde (et 450.000 en France, où elle est la première cause de chirurgiechirurgie, ndlr).

Désormais bien maîtrisée, cette chirurgie peut changer la vie… Mais qui ne préférerait pas éviter une intervention au niveau de l’œil si un traitement moins invasif était disponible ? D’où notre proposition : administrer de simples gouttes ophtalmiques à base de stérols, des substances de la famille des graisses qui existent dans la nature.

Entrée en jeu des gouttes ophtalmiques

Le composé stérol que nous avons identifié avait déjà été testé auparavant, mais pas pour son effet sur la qualité optique du cristallin. Pourtant, il s’agit là d’une propriété fondamentale de l’œil pour que la lumière voyage sans entrave jusqu’à la rétine, et donc pour maintenir la vision.

Des investigations menées dès 2015 sur un panel de moléculesmolécules, dont ce composé stérol, montraient en effet qu’il était capable de restaurer partiellement la solubilité des protéines à la fois dans les cristallins de souris vivantes âgées et dans des cristallins humains placés in vitro, dans des boites de Pétri. Avec pour résultat une amélioration de la transparence du cristallin chez la souris âgée (Lire notre article ci-dessous).

Toutefois, une étude ultérieure en 2019 n’avait pas pu confirmer que ce composé pouvait bien inverser l’accumulation de protéines dans des échantillons de rats et d’humains, ou l’opacification du cristallin chez le rat âgé atteint de cataracte. Cependant, le composé stérol n’avait pas été testé sur des cristallins humains entiers et intacts.

Un nouveau type de neurone découvert dans les yeux

Et, surtout, son effet sur la qualité optique du cristallin (en l’occurrence la propriété optique de son indice de réfractionindice de réfraction) n’avait pas été mesuré. Pour en avoir le cœur net, mes collègues et moi-même avons récemment mené une nouvelle étude sur 26 souris atteintes de cataractes. Elle a bien montré des effets prometteurs et spectaculaires sur la cataracte après son applicationapplication du composé de stérol sélectionné sur leurs yeux.

Lorsque le composé a été appliqué sur un seul de leurs yeux malades (afin de permettre la comparaison), nous avons constaté que l’opacité du cristallin était réduite dans 46 % des cas. De plus, 61 % des cristallins traités présentaient une amélioration du gradientgradient de leur indice de réfraction. Ce gradient est une mesure importante de la densité optique, et un élément essentiel de la qualité de l’image perçue.

Cependant, les effets bénéfiques n’ont pas été observés chez toutes les souris. Ce qui suggère que ce type de traitement pourrait ne pas s’appliquer à toutes les cataractes (il en existe plusieurs types, en fonction de leur localisation, si elle est liée à l’âge, à un choc, etc.).

Évaluer l’effet sur la qualité optique

Pour arriver à ce constat, il fallait avoir le moyen d’évaluer finement l’évolution de la qualité optique du cristallin. J’ai pour cela passé des années à développer des méthodes de mesures adaptées. Depuis plus de dix ans, je me focalise ainsi l’optique du cristallin à l’aide du synchrotron SPring-8 au Japon – l’un des plus puissants au monde. Cet accélérateur de particules produit de puissants rayons Xrayons X, ce qui permet de mesurer avec une précision inédite les propriétés de l’œil.

Une piste pour traiter la cécité s’ouvre avec la thérapie génique

L’application des mesures aux rayons X a été la clé de nos dernières découvertes. De plus, nous travaillons sur des cristallins complets, si bien que la distribution des protéines problématiques n’y est pas perturbée – ce qui est fondamental pour étudier de façon fiable ses propriétés optiques.

C’est cette technologie qui nous a permis, à mes collègues et à moi-même, de caractériser avec précision le gradient de l’indice de réfraction dans des cristallins jeunes et transparentstransparents ainsi que dans leurs avatarsavatars présents dans des yeux plus âgés et affectés par la cataracte. Comme on l’a dit, ce gradient est important pour la qualité de l’image car il permet une meilleure capacité de mise au point. Lorsque la cataracte se développe, des protéines fragmentées s’accumulent dans le cristallin, ce qui perturbe ce gradient… et donc la vision.

Une piste en cours de développement

Le lien entre la fonction optique du cristallin et la solubilité des protéines et leur propension à s’agglomérer doit continuer à être investigué plus avant. C’est nécessaire pour confirmer qu’il est bien possible d’inverser le processus de formation de la cataracte, et ainsi de rétablir la transparence d’un cristallin opacifié.

Les scientifiques ont longtemps cru que l’accumulation des principales protéines structurelles de la cataracte – les cristallines – était irréversible. Par conséquent, le traitement de la cataracte ne pouvait, au mieux, que stopper ou ralentir sa progression.

Si ce n’est pas le cas, ce que suggèrent nos résultats, et que l’agrégation des protéines est bien réversibleréversible, cela ouvre une multitude de possibilités de futurs traitements…

Non seulement la cataracte pourrait être prévenue en évitant certaines causes connues, telles que la mauvaise alimentation, le tabagisme et certains médicaments, comme les stéroïdesstéroïdes, mais il serait peut-être possible de développer des médicaments pour empêcher la progression de la maladie. D’autres pourraient être envisagés pour inverser le processus de formation de la cataracte et redonner de la clarté à un cristallin opacifié.

Les yeux comme indicateurs de la maladie d’Alzheimer ?

Les recherches futures doivent inclure des investigations sur toutes les protéines du cristallin : les principales protéines structurelles du cristallin (cristallines, protéines membranaires assurant le transport de l’eau…) en tandem avec des études de la fonction optique.

Nous continuons à étudier l’optique du cristallin sous tous ses aspects et à tous les âges, depuis les premiers stades du développement embryonnaires jusqu’à l’âge adulte. Notre objectif ? Savoir comment ces résultats, ces observations peuvent être reliés à des changements dans les protéines qui constituent cette lentillelentille organique.

De nombreuses autres recherches que les nôtres sont bien sûr encore nécessaires, mais nos derniers résultats ont montré qu’un traitement non chirurgical de la cataracte est possible. Mieux, il est peut-être plus proche que nous ne le pensons…


Un collyre pourrait traiter la cataracte par de simples gouttes dans l’œil. Le « composé 29 » a en effet obtenu des résultats encourageants chez un modèle de souris ; il agit en limitant l’agrégation des protéines cristallines de l’œil.

Article de Marie-Céline RayMarie-Céline Ray, publié le 11 novembre 2015

La cataracte représente la principale cause de cécité dans le monde. Causée par la perte de transparence du cristallin au cours du vieillissement, elle affecterait plus de 20 millions de personnes. Elle peut se traiter par chirurgie, par remplacement du cristallin, mais cette approche est coûteuse ; de nombreuses personnes dans le monde restent aveugles par absence de traitement.

Tout comme la maladie d’Alzheimer ou la maladie de Parkinsonmaladie de Parkinson, la cataracte est une maladie caractérisée par le mauvais repliement et l’agglutinement de protéines. Dans le cas de la cataracte, il s’agit des cristallines, des cellules qui forment le cristallin de l’œil. Ces cellules fibreusesfibreuses sont particulières, comme l’explique Jason Gestwicki : « Peu de temps après la naissance, toutes les cellules fibreuses de l’œil perdent la capacité à faire de nouvelles protéines, ou à jeter les vieilles protéines. Donc les cristallines que vous avez dans votre œil adulte sont les mêmes que celles avec lesquelles vous êtes né ».

Pour que le cristallin fonctionne bien, le réservoir de cristallines doit conserver la transparence des cellules fibreuses. Des protéines chaperonsprotéines chaperons permettent aux cristallines de rester solubles pour jouer leur rôle. Mais les configurations pathologiquespathologiques, avec des cristallines agglutinées, sont bien plus stables qu’un repliement normal : les protéines chaperons doivent constamment résister à la tendance des cristallines à s’agglomérer. C’est le même genre de processus qui est en jeu dans d’autres maladies liées au vieillissement, comme la maladie d’Alzheimer, mais avec d’autres protéines et dans un autre organe. Les protéines agglomérées sont appelées amyloïdes.

Le composé 29 est suffisamment soluble pour faire un médicament

Dans une nouvelle étude de l’UC San Francisco, de l’université du Michigan et de l’université Washington à St Louis parue dans Science, des scientifiques ont cherché un composé soluble qui pourrait servir de traitement à la cataracte. Pour ce faire, ils ont utilisé une différence importante entre les cristallines correctement repliées et leurs formes amyloïdes : leur point de fusionfusion. Ils ont employé une méthode de fluorimétrie (HT-DSF) dans laquelle les protéines émettent de la lumière quand elles atteignent leur point de fusion. L’équipe a cherché des molécules qui abaissaient le point de fusion des amyloïdes.

Récemment, une molécule, le lanostérol, a été identifiée comme capable d’inverser la cataracte, ce qui a fait l’objet d’une publication dans Nature. Mais le lanostérol est peu soluble, il fallait l’injecter dans l’œil pour qu’il ait des effets. En utilisant le lanostérol et d’autres stérols, les chercheurs ont assemblé et testé 32 stérols ; l’un d’eux, appelé « composé 29 », était le meilleur candidat soluble pour être utilisé dans des gouttes ophtalmiques. Les molécules identifiées se liaient aux alpha-cristallines CryAA et CryAB et inversaient leur agrégation in vitro.

Dans des tests in vitro, les chercheurs ont confirmé que le composé 29 stabilisait les cristallines et les empêchait de former des amyloïdes. Ils ont aussi trouvé que le composé pouvait dissoudre des amyloïdes déjà formées. L’équipe a aussi testé le composé dans une formulation sous forme de gouttes pour les yeux chez un modèle de souris pour la cataracte : les gouttes restauraient partiellement la transparence des cristallins. Des résultats similaires ont été obtenus avec des gouttes du composé 29 appliquées sur des tissus humains de cristallin touché par la cataracte.

La substance identifiée s’apparente donc à un « chaperon pharmacologique » qui restaure partiellement la transparence du cristallin. Ces travaux suggèrent que des approches thérapeutiques visant à stabiliser les alpha-cristallines pourraient traiter la cataracte.

 

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Written by Milo

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